Renaissance et naissance d’Henri IV

Oloron avait eu Gaston le Croisé, Orthez Gaston Phébus : Pau aura Henri IV. C’est à Pau que fut construit le superbe château Renaissance des rois de Navarre, au milieu duquel s’élevait encore le donjon construit par Gaston Fébus…
A la fin du Moyen-Âge, Pau est la nouvelle capitale du petit Royaume. Nous sommes à l’époque de la Renaissance, et François I° guerroie en Italie contre le roi d’Espagne. A ses côtés, un robuste seigneur et ami, Henri II d’Albret, roi de Navarre. Un robuste seigneur qui a la touche de tous les souverains de l’époque. Béret emplumé, larges épaules, barbiche pointue et légèrement frisée. Il combat aux côtés du roi de France et voue une haine féroce aux Espagnols. Une haine qui ne date pas de l’époque où la France et l’Espagne de Charles Quint se font la guerre, mais plutôt de celle, encore récente, où les Espagnols ont repris la Navarre aux Béarnais. Une haine personnelle, locale, qui sert parfaitement la haine, plus diplomatique et historique, du royaume de France pour l‘Espagne…
En 1525, c’est le désastre. A la bataille de Pavie, le roi François I° est fait prisonnier par Charles Quint et emporté en captivité à Madrid. Il quitte sa prison après avoir bradé la moitié de la France contre sa liberté. En route vers Paris, il fait une halte à Pau, chez son ami Henri II. Il est accompagné par sa sœur, la belle et célèbre Marguerite, qui tombe sous le charme du grand béarnais velu. C’est le coup de foudre. François I°, enthousiaste, offre sa sœur à son vieux copain. Elle deviendra Marguerite de Navarre, grand-mère d’Henri IV, et se taillera une renommée dans le monde des lettres françaises, en écrivant l’Heptaméron (encore étudié dans les Lycées et les Universités), et en devenant la protectrice des grands écrivains humanistes : Rabelais, l’auteur grivois de Gargantua, s’abritera sous ses jupes pour échapper aux foudres de l’église…
De cette belle et intelligente femme, Henri II attend un héritier qui poursuivra sa lutte personnelle contre les Espagnols. Marguerite accouche d’une fille. De l’autre côté des Pyrénées, les Espagnols éclatent de rire :
- Ah ! Ah ! Le lion a accouché d’une brebis !
Henri II enrage et élève sa fille, Jeanne, comme un véritable homme politique. Elle n’avait de féminin que le sexe, disaient les chroniqueurs de l‘époque. Jeanne d’Albret devient reine de Navarre et se convertit au protestantisme. Une mode, dans l’air du temps, pour ceux qui veulent échapper à l’emprise du Pape et de l’Eglise. Le Béarn tout entier devient protestant. On le compare à une nouvelle Genève, une Genève du sud, plantée dans la patte du plus grand pays catholique de l‘époque : l’Espagne…
Jeanne d’Albret est engrossée par son mari, Henri de Bourbon, et met bas, dans une salle du château de Pau, à un petit garçon. Henri II, presque gâteux, le soulève vers les Pyrénées et s’écrie :
- Ma brebis a accouché d’un lion ! ! !
Ce sera le futur roi de Navarre et de France, Henri (pas encore IV), qui héritera de la haine que son grand-père portait à l’Espagne. En attendant, la légende nous raconte qu’on lui donna, pour berceau, une vaste carapace de tortue où il suçait vigoureusement son pouce…